Légende des images d'oeuvres d'artistes :
Eva Berendes, Grid (Hat), 2013. Steel, lacquer, mixed media, 251 x 152 x 26 cm.
Courtesy of Jacky Strenz, Frankfurt/Main. Photo by Wolfgang Günzel.
Eva Berendes, Grid (Racket), 2013. Steel, lacquer, mixed media, 251 x 152 x 25 cm. Courtesy of Jacky Strenz, Frankfurt/Main. Photo by Wolfgang Günzel.
Anna-Sophie Berger, ultraflex (yellow), 2014. Digital print on Dibond, 70 x 25.9 inches. Courtesy of the Artist.
Anna-Sophie Berger, ana at JTT, 2015. C-print on dibond, 200 x 80 cm. Courtesy of the Artist.
Ditte Gantriis, Body & Soul, 2014. Wickerwork, 182 x 115 cm. Unique. Courtesy of Frutta, Rome. Photo by Roberto Apa
Ditte Gantriis Body & Soul, 2014. Wickerwork 76 x 160 cm. Unique. Courtesy of Frutta, Rome. Photo by Roberto Apa
Stéphane Devidal, untitled, 2015. Collage digital. Courtesy of the Artist.
Zoe Williams, You Consume Me I, 2013. Originally shown as C-Type-print, in Aluminium frame. Approx. 101 x 67 cm. Courtesy of Zoe Williams and Galerie Antoine Levi, Paris.
Zoe Williams, You Consume Me III, 2013. Originally shown as C-Type-print, in Aluminium frame. Approx. 101 x 67 cm. Courtesy of Zoe Williams and Galerie Antoine Levi, Paris.
« …les femmes qui marchent dans les défilés de mode sont hantées par celles qui marchent dans les livres, comme elles le sont par celles qui marchent dans les films, comme elles le sont par celles qui marchent dans les rues. » 1
C’est sans doute à la mesure de ce déplacement gigogne que peut s’établir un parallèle entre le caractère fantasmatique de la mode et l’intérêt nourri par It’s Our Playground pour l’œuvre d’art et sa matérialité à l’ère numérique. Derrière l’entité It’s Our Playground, Camille Le Houezec et Jocelyn Villemont explorent des possibilités virales d’un mode de monstration à l’heure d’Internet depuis 2009. Sous la forme d’invitations et de processus collaboratifs, leur pratique du curating s’apparente au médium à part entière et se caractérise par un traitement particulier de l’œuvre et de sa diffusion. Pour les deux artistes, l’esthétique véhiculée par la culture web générent des contextes qui orchestrent des navigations plurielles de l’exposition au moment de Tumblr ou d’Instagram. En regard de ces flux d’informations contemporains, le duo multiplie les croisements et les surfaces d’accroches entre surf visuel et arts populaires, notion d’écran et white cube traditionnel, vijing et muséographie.
Pour leur exposition à Glassbox, Camille Le Houezec et Joey Villemont s’emparent de l’habit et du transfert imprimé comme support nomade à la présentation plastique. Clin d’oeil à la vitrine de boutique, Show room investit le registre du domestique par le biais de quatre mannequins portant une ligne de vêtements customisés qui a comme toile de fond un wallpaper en noir et blanc. Amalgame de sources qui se superposent telle une matière brute, la scène propose une promenade virtuelle dont l’immersion s’incarne par l’allure de ces personnages face à un mur composé de vues d’exposition. Entre diaporama et archivage, ces photographies multipliées comme un motif pour constituer ce papier peint, sont issues d’une sélection d’expositions opérée par les deux artistes par le filtre d’Internet.
A la manière d’exhausteurs de ce début de XXIè siècle, Camille Le Houezec et Joey Villemont signent un ensemble de textures qui mêlent ainsi des formes glanées dans le répertoire artistique, le design et l’histoire de la mode. Dressing de signes se contaminant entre eux, Show room consiste en une variation graphique à la façon du cabinet de style en 3D et le patronage brassant espaces de grilles, meubles tressés en rotin, tatoos et dessins crayonnés devenus ornements vestimentaires. Pirouette iconoclaste, si It’s Our Playground ne se place pas dans la critique d’un consumérisme médiatique, le duo revendique l’expérimentation d’une collusion entre copier coller et air du temps.
Collection capsule prétexte à la captation de figures, leur dispositif mixe les procédés de l’échantillonnage et du modélisme selon le streaming ou l’à-plat généralisé d’un imaginaire provenant de la sphère digitale. A l’instar de la robe Mondrian de Saint Laurent ou d’une basket issue d’un récent défilé Chanel, c’est dans de ce tissage iconographique que les deux artistes convient les pièces de Zoe Williams, Eva Berendes, Stephane Devidal, Ditte Gantriis et Anna sophie Berger. Empruntant aux codes de la mode, Camille Le Houezec et Joey Villemont interrogent l’idée d’œuvre sous sa trame documentaire par cette reproductibilité des images et une logique de l’accessoire. Projections de fragments et de plis, Show room questionne la relation qu’entretient un spectateur flâneur face à l’aura volatile des représentations et la perception du corpus global puisé sur Internet.
Entre catwalk immobile et tableau patchwork, Show room décline dès lors la devanture et le display de galerie d’art offrant ainsi une circulation paradoxale comme une invitation à glisser entre les mailles de l’époque. A l’échelle de cet effet de diffraction entre la chose portée et regardée, Show room est une exposition collective confectionnée à quatre mains par des artistes curateurs, Camille Le Houezec et Joey Villemont, devenus entre temps stylistes. Pop up the volumes.
Frédéric Emprou
1 - Farid Chenoune, Les dames qui marchent, une collection de citations in Showtime, le défilé de mode, Musée Galliera, Paris-Musées, Actes Sud, 2006.
Show Room
Une exposition de It's Our Playground
Avec les images d'oeuvres de Eva Berendes, Anna-Sophie Berger,
Ditte Gantriis, Stéphane Devidal, Zoe Williams